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L’Arabie saoudite procède à des arrestations pour des publications anti-israéliennes sur les réseaux sociaux

Les autorités saoudiennes ont intensifié leur répression contre les critiques en ligne concernant l’offensive israélienne à Gaza, alors qu’un accord de normalisation demeure sur la table
Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane lors du 15e sommet annuel des dirigeants du G20 à Riyad, le 22 novembre 2020 (Cour royale saoudienne/Reuters)
Par MEE

L’Arabie saoudite aurait lancé une campagne de répression contre les citoyens du royaume qui expriment en ligne des opinions critiques à l’égard de la guerre menée actuellement par Israël à Gaza.

Les affirmations contenues dans un article de Bloomberg publié mercredi interviennent alors que des responsables américains suggèrent que des pourparlers sont en cours pour un accord de normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël.

Selon l’article, qui cite des sources diplomatiques anonymes, parmi les personnes détenues figure un cadre qui travaille pour une entreprise impliquée dans Vision 2030, le projet économique phare dirigé par le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Des sources proches du dossier ont déclaré à Bloomberg que la personne avait été arrêtée pour avoir exprimé des opinions « incendiaires » sur le conflit actuel entre Israël et Gaza.

Ont également été arrêtées une personnalité médiatique qui, selon Bloomberg, a déclaré qu’« Israël ne devrait jamais être pardonné » et une personne qui a appelé au boycott des fast-foods américains en Arabie saoudite.

« Ce que nous constatons, c’est qu’au lieu d’apporter la paix, [la normalisation] apportera probablement au peuple saoudien davantage d’arrestations et de harcèlement »

- Lina al-Hathloul, ALQST

Les militants saoudiens affirment que l’article prouve que la perspective d’une normalisation avec Israël a conduit à une plus grande répression dans le royaume.

« Cela expose les mensonges qui entourent la potentielle normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël », déclare à Middle East Eye Lina al-Hathloul, responsable de la surveillance et du plaidoyer au sein de l’ONG de défense des droits de l’homme ALQST.

« [La normalisation] est présentée comme un traité de paix entre Israël et les États arabes. Or il n’y a pas de guerre entre l’Arabie saoudite et Israël. Ce que nous constatons donc, c’est qu’au lieu d’apporter la paix, elle apportera probablement au peuple saoudien davantage d’arrestations et de harcèlement. »

Middle East Eye a contacté le ministère saoudien des Affaires étrangères mais n’avait pas reçu de réponse au moment de la publication de cet article.

En 2020 et 2021, Israël a conclu des accords de normalisation négociés par les États-Unis avec les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et le Maroc.

Depuis lors, les spéculations persistent sur un accord similaire avec l’Arabie saoudite, un allié clé des États-Unis.

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En janvier, le prince Khalid ben Bandar, ambassadeur saoudien à Londres, a annoncé qu’un accord de normalisation était « proche », bien que le royaume ait suspendu les négociations menées sous l’égide des États-Unis après l’attaque meurtrière dirigée par le Hamas palestinien en Israël le 7 octobre.

Le ministère saoudien des Affaires étrangères a affirmé en février qu’aucune normalisation n’aurait lieu sans un cessez-le-feu à Gaza et sans progrès vers la réalisation d’un État palestinien.

Cependant, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a déclaré cette semaine que Washington et Riyad s’étaient engagés dans une diplomatie intensive au cours du mois dernier pour parvenir à un accord de normalisation.

« Le travail que l’Arabie saoudite et les États-Unis ont accompli ensemble dans le cadre de nos propres accords est, je pense, potentiellement très proche d’aboutir », a-t-il indiqué dimanche lors du Forum économique mondial à Riyad.

Une pratique répressive courante

La répression de la liberté d’expression, en particulier la détention de personnes en raison de leurs publications sur les réseaux sociaux, est une pratique courante depuis que Mohammed ben Salmane est devenu prince héritier en 2017.

Le royaume ne divulgue pas le nombre de personnes détenues et ne les poursuit pas devant le système judiciaire normal.

Ces détenus comparaissent généralement devant le tristement célèbre tribunal pénal spécialisé et sont jugés en vertu d’une loi antiterroriste qui, selon les organisations de défense des droits humains, permet des violations flagrantes du droit à un procès équitable.

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Parmi les personnes arrêtées pour des posts sur les réseaux sociaux, figure l’instructrice de fitness Manahel al-Otaibi, emprisonnée depuis novembre 2022 pour des publication en faveur de plus grandes libertés pour les femmes dans le royaume.

Ou encore la lycéenne Manal al-Gafiri, qui purge une peine de dix-huit ans de prison pour avoir publié des tweets favorables aux prisonniers politiques saoudiens.

De même, Salma al-Shehab, doctorante à l’Université de Leeds, au Royaume-Uni, a été condamnée en 2022 à 34 ans de prison pour des publications sur les réseaux sociaux dans lesquelles elle exigeait le respect des droits humains.

Traduit de l’anglais (original).

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